Il y a plusieurs manières de voir l’affaire Cahuzac. Il y a
bien sûr le scandale et « la gauche morale », celle à laquelle je croyais,
clouée au pilori par un homme empêtré dans ses mensonges, un ministre chargé de
la lutte contre la fraude fiscale qui a probablement été un fraudeur fiscal.
Et il y a l’autre, celle vue des réseaux sociaux, des
médias, … Bien plus rigolote et évocatrice de notre société.
Je parcourais Twitter, à midi. Les twittos sont plus
intéressé par taper sur Jean-Michel Apathie qui est obligé de se
justifier
pour ne pas avoir cru sur parole Médiapart, comme moi.
« J'estime que ma crédibilité n'est
absolument pas remise en cause. » « Depuis le
début, je demande à Edwy Plenel s'il a des preuves dans cette affaire. Il me répond
que oui. Pourquoi ne les publie-t-il pas, alors ? C'est ce que j'ai toujours
demandé. Je n'ai rien contre Mediapart. J'ai juste toujours dit que je ne
savais pas si Cahuzac avait un compte en Suisse. ».
Pareil ! Me voila à défendre Apathie. Ce qui fait
plaisir, c’est que le Canard Enchaîné est sur la même longueur d’onde. Il, « dans un éditorial signé par son rédacteur en chef Louis-Marie
Horeau, juge qu'il n'y a « rien d'étonnant à ce que la grande majorité des
médias, Le Canard compris, ait regardé le début de la pièce avec prudence et
circonspection », même si « le héros involontaire donnait du grain à moudre,
en multipliant les maladresses troublantes ». « Lorsque le rideau s'est
levé, voilà quatre mois, il n'y avait guère, sur scène, qu'une conversation téléphonique
captée par hasard. Une voix, dont il fallait croire, sans preuve tangible, que
c'était celle du ministre, évoquait l'existence d'un embarrassant compte en
Suisse » »
C’est aussi l’histoire d’un couple fortuné qui entame
une
procédure de divorce. Les sommes enjeux sont importantes. Comment sera
partagé le gâteau ?
« Selon les informations du
Canard Enchaîné, la femme de l'ancien ministre, Patricia Cahuzac, aurait engagé
en octobre 2011 des détectives privés pour enquêter sur son mari. »
Un détective déclare : « très vite, nous
avons découvert que des officines travaillaient à la recherche d'informations
compromettantes. »
« "L'officine" évoquée
par Le Canard Enchaîné serait rapidement arrivée à contacter [un] inspecteur
des Impôts à la retraite, l'auteur d'une lettre de dénonciation évoquant la
possession d'un compte occulte en Suisse par le ministre du Budget. »
M. Cahuzac est un membre important du Gouvernement mais, à l’époque
de l’enquête, il n’était qu’un brillant politicien de l’entourage de François
Hollande, candidat à la Présidence de la République. L’avocate de Mme Cahuzac
est la sœur de M. Copé, patron du parti qui « portera » le principal
candidat, Nicolas Sarkozy, président sortant, opposé à François Hollande.
« L'affaire, qui a désormais
valu à Jérôme Cahuzac son portefeuille ministériel est digne d'un polar
financier. Selon Mediapart, le compte en Suisse présumé aurait été transféré à Singapour,
un compte auquel n'aurait pas accès l'épouse du socialiste. Heureux hasard
selon Le Canard Enchaîné, Patricia Cahuzac aurait reçu la visite à son cabinet
en mai 2012 d'un patient qui n'avait aucun problème de cheveux. La raison de sa
visite : des informations sur le compte suisse de son époux, qu'il mettait à sa
disposition contre 3 000 euros. Toujours selon Le Canard Enchaîné, Patricia
Cahuzac l'aurait alors mis à la porte. »
Voilà comment je voyais l’affaire, jusqu’à hier soir et « l’aveu ».
Tel que je le comprends, pour éviter de payer trop cher pour
son divorce, Jérôme Cahuzac fait transféré un compte « oublié » de
Suisse à Singapour et des détectives privés payés par sa femme trouve des
traces. Alors que l’avocate est la sœur du patron de l’UMP, l’affaire aboutit
dans les mains de la presse.
Elle en devient une affaire politique, avec d’incessants
petits juges sûrs d’eux.
Avant-hier soir, on ne savait rien.
C’est depuis hier soir que c’est très grave parce que le
peuple de gauche a le sentiment d’avoir été trahi et doute. Le peuple de gauche ?
Bah ! J’aurais pu dire « le peuple » mais il me semble que, à
droite, on attend moins de la gauche.
On reproche à un journaliste de se justifier. On reproche à
un ancien ministre d’avoir menti. Un mensonge d’un ministre ou le doute d’un
journaliste deviennent plus grave qu’un détournement fond ou une trahison du
peuple.
Voila Twitter.
Ca me laisse
pantois.
On me reproche - ailleurs - de défendre de Cahuzac. Moi, je défends tout le monde. Mais j'ai envie de répondre à ce qui me critiquent : et maintenant, on fait quoi ? Ayrault doit démissionner ? Ca nous fera une belle jambe. Hollande doit dissoudre l'Assemblée ? Vous voulez le retour de la droite...
On a une seule solution : se serrer les coudes. De toutes manières, le mal est fait. Il est terrible.