Le Gouvernement a ainsi annoncé ce matin son espèce de plan pour la compétitivité. Beaucoup de copains, à gauche, sont consternés par l'augmentation de la TVA. Moi aussi, je dois dire, mais pour une raison vicieuse : ayant passé pas mal de temps à lutter contre cet impôt injuste, la pilule a du mal à passer, comme si je devais renier des engagements.
Cela étant, je ne vais pas en faire une jaunisse : l'augmentation du taux principal est dérisoire. Mais elle existe.
Nous allons positiver : nous avons maintenant trois taux bien propres, 5, 10 et 20%. Ca a le mérite d'être simple. En plus, ça ne sera validé qu'à l'occasion de la préparation du budget 2014.
Il y a d'autres aspects qui me gênent. Le premier est cette espèce de précipitation : Louis Gallois remet son rapport hier, le Gouvernement se réunit ce matin pour en discuter et les annonces sont faites dans la foulée. Comme des informations avaient fuité et qu'on peut supposer que le Gouvernement n'est quand même pas un ramassis d'incompétents, on peut penser que tout était prévu à l'avance. De là à penser qu'il s'agit d'une gigantesque manipulation, il n'y a qu'un pas à franchir. Le Gouvernement n'aurait-il pas dicté son rapport à Louis Gallois pour pouvoir y appuyer des machins prévus ? Je ne franchis pas le pas. Disons que M. Gallois a donné des résultats par oral avant la remise officielle et que quelques gugusses ont bossé pour faire un magnifique dossier avec les propositions pour qu'elles soient prêtes et qu'il soit imprimé ce matin…
Il n'empêche que la communication est bizarre : on a beaucoup reproché à Nicolas Sarkozy d'agir dans la précipitation et, cette fois, la précipitation est telle que ça ne peut pas en être. Le CICE (Crédit d'Impôt pour la Compétitivité et l'Emploi) n'a pas pu être inventé hier, l'argumentaire n'a pas pu être fait en moins de 24 heures, surtout avec François Hollande en visite à l'autre bout du monde.
A ce propos, je note qu'il semble ne pas être impliqué dans cette histoire. C'est bien Jean-Marc Ayrault qui est en première ligne. La presse titre bien sur Matignon et le Gouvernement, pas du tout sur le Président ce qui est d'ailleurs « normal » : ce n'est pas au Président de s'occuper de ce genre de bricole. Jean-Marc Ayrault avait besoin de ça puisque sa compétence était mise à rude épreuve, la semaine dernière, où il était accusé de ne pas tenir son Gouvernement et de faire lui-même des couacs.
Le fait que le Président de la République n'est pas en première ligne est intéressant. Si la grogne est trop forte, il pourra toujours annuler l'augmentation de la TVA. C'est un truc que l'on pratique souvent en entreprise : en temps que cadre, je prends des décisions et je les annonce. Si les autres ne sont pas compétents, ma direction peut intervenir et dire « oups, désolé, j'avais oublié de prévenir Nicolas de cet aspect patati patata).
Toutes les boites font ça. C'est une ancienne directrice qui m'avait appris le truc. Je m'égare mais ne mettez jamais votre hiérarchie en simple copie d'un mail, mettez la en copie cachée. Elle pourra toujours faire semblant de ne pas être au courant et rattraper vos actions si elles s'avèrent ne pas être les bonnes.
Je résume la première partie de ce billet qui fera date dans l'histoire de ce blog vu que ça fait longtemps que je n'y ai rien glandé : le bordel est tel qu'il ne peut être que prémédité ou cacher autre chose.
Cacher autre chose ? Je ne vois pas pourquoi on serait à une semaine près… d'autant que les mesures principales s'appliqueront en 2014.
Mais l'élection présidentielle aux USA fera la une des journaux télévisés ce soir et de la presse papier demain matin.
La deuxième chose qui m'étonne dans le plan du Gouvernement est de voir une hausse de la TVA, surtout qu'elle est particulièrement modérée. Tous les gens de gauche ont horreur de la TVA et la grogne est certaine.
Il aurait été facile d'augmenter un tout petit peu la CSG. Les militants qui soutiennent le Gouvernement dans les réseaux sociaux auraient mis leur queue entre les jambes quelques heures alors que maintenant ils sont franchement emmerdés voire, font des billets de blog pour rentrer dans le lard au Gouvernement qui les aurait trahis…
Le Gouvernement n'avait probablement pas le choix d'augmenter un de ces deux impôts pour éviter de se retrouver dans le rouge trop rapidement. Le choix de la TVA est surprenant. Il y a-t-il une volonté du Gouvernement d'épargner les gros salaires ? Juge-t-il que les augmentations des cotisations sur les retraites auraient déjà eu assez de côtés négatifs ?
Il n'empêche que « renier » à ce point une promesse forte est bizarre.
Enfin, renier est un bien grand mot. Le principal engagement était de supprimer la hausse de 1,2 points prévue par la droite. Ca a été fait. Mais de là à la remplacer par une hausse de 0,4, c'est surprenant.
Bref, je me pose des questions…